Mars, avril et mai 2024, Pic de chaleurs inégalées en Guinée tant à Conakry qu’à l’intérieur du pays. L’heure n’est plus à l’alerte mais plutôt à l’action concrète pour la sauvegarde de l’environnement en Guinée dans ce contexte de changements climatiques. Dans cette présente tribune, nous ferons, en premier lieu, l’alarmant constat, puis les potentialités existantes, en second lieu, avant d’envisager des actions urgentes pour reverdir la Guinée, en troisième et dernier lieu.
L’alarmant constat de la dégradation de l’environnement
En termes de chaleur observée mars et avril dernier, on ne sent plus la différence entre Conakry, d’ordinaire plus chaud, que l’intérieur du pays. Les températures ressenties à Mamou, Boké, Dinguiraye, Kankan, Siguiri, Kissidougou et ailleurs dépassent de loin les températures moyennes saisonnières. L’air est sec. L’environnement est fortement dégradé. On note le recul du couvert végétal et la raréfaction de la pluie. En Guinée comme ailleurs, le constat des changements climatiques n’est plus l’affaire de quelques scientifiques ou des militants et militantes de la société civile vouée à la protection de l’environnement, il est aujourd’hui le fait du citoyen lambda. Tout le monde appelle à une inversion de cette tendance lourde de dégradation de l’environnement à celle de sa restauration. En dépit cet alarmant constat, des potentialités favorisant des actions nécessaires en la matière existent.
Les potentialités existantes sur lesquelles s’appuyer pour restaurer l’environnement
L’action des quelques ongs impliquée dans les campagnes de reboisement est à signaler. Pour illustration, on peut noter l’une des pionnières en ce domaine, Guinée Ecologie, avec la restauration de la mangrove en zones côtières. Il faut noter aussi, dans ce même ordre, une belle initiative invitant toute personne à planter un arbre à l’occasion des anniversaires, initiative qui a permis de reforester une partie de la forêt urbaine de Kakimbo et ailleurs. Cette initiative novatrice est portée par l’ong Agir contre le réchauffement climatique (ACOREC). S’y ajoute les initiatives comme « Donkin Leggal » ou « Tabaski Reboisement », action liant les fêtes de tabaski au village par le reboisement des collectives, actions portées par les ressortissants de ces derniers. Il y a également, de telles actions de reboisement figurant dans les programmes d’actions lors des vacances scolaires et universitaires par les associations des jeunes étudiants ressortissants et amis de ces communautés locales. En se fondant sur l’existence de ces potentialités, il est urgent de poser la série des actions proposées ci-dessous.
Les actions urgentes pour une Guinée verte
Plusieurs actions urgentes peuvent être menées par divers acteurs tant étatiques que privés pour redonner à la Guinée ce qu’elle fût jadis, une « Guinée verte ». Il s’agira de protéger et assurer la restauration des forêts urbaines ainsi que les milieux humides. Il y a également lieu de protéger les zones agricoles en le soustrayant de toute opération d’urbanisation au moyen d’un zonage restrictif. L’Etat pourra aussi déclarer de vastes zones primaires du territoire national zones de réserves protégées de toute action anthropomorphique ; surveiller les opérations de restauration de l’environnement après opération, en particulier dans les zones minières et appliquer avec détermination l’ensemble des lois portant protection de l’environnement en poursuivant et en punissant les auteurs d’infractions y relatives. Une autre action consistera à inclure dans tout projet et programme bénéficiant du concours financier de l’Etat ou par le biais du financement de ses partenaires un pourcentage alloué aux activités de reboisement et de protection de la nature et rendre obligatoire l’entretien d’une forêt collective à chaque collectivité locale. L’une des actions durables et grande échelle sera de réhabiliter et rendre effective la Loi Fria et étendre son champ d’application consistant à lier l’opération de planter un arbre à l’occasion des actes et faits d’Etat-civil. Il faudra aussi inclure les programmes de reboisement dans les activités des forces armées et les corps de conservateurs de la nature, en particulier, ainsi que d’autres forces de défense et de sécurité en général. L’éducation à l’environnement devra figurer dans les curricula d’enseignement dans tous les cycles d’enseignement en Guinée.
Pour conclure, face à l’alarmant constat que dessus et l’urgente nécessité d’agir, il est essentiel pour chaque personne et pour tout le monde, tant individuellement que collectivement, sous la conduite de l’Etat, de poser le geste vert pour notre environnement en faveur de toutes les couches de la population en République de Guinée.
Conakry, le 15 mai 2024
–Juris Guineensis No 62
Me Thierno Souleymane BARRY, Ph.D
Docteur en droit, Université de Sherbrooke/Université Laval (Canada)
Professeur de droit, Consultant et Avocat à la Cour