Face aux restrictions américaines : pour une diplomatie africaine de responsabilité et de dialogue

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Depuis quelques semaines, plusieurs pays africains figurent sur la liste des États soumis à de nouvelles restrictions de visas ou de voyages par les États-Unis d’Amérique. Cette situation, bien que préoccupante, mérite d’être analysée avec recul, maturité et sagesse. En tant qu’Africain engagé et diplomate de carrière, je me permets de m’adresser aux Chefs d’État africains ainsi qu’aux responsables de nos représentations diplomatiques pour proposer une voie de discernement.

Il serait tentant, face à ces mesures, de brandir le principe de réciprocité ou d’opter pour une posture de fermeté immédiate. Pourtant, l’Histoire nous enseigne que la diplomatie véritable se construit dans la durée, dans le respect mutuel et par la recherche inlassable du dialogue. La grandeur d’une nation ne se mesure pas à sa capacité de réagir dans l’urgence, mais à sa faculté de négocier avec intelligence, sans renoncer à sa dignité ni à ses principes.

Il convient de rappeler que les décisions prises par les États-Unis – première puissance mondiale – peuvent avoir, qu’on le veuille ou non, des répercussions sur l’équilibre international. Cependant, loin de nous résigner, il s’agit de comprendre les nouvelles orientations de la politique étrangère américaine et d’y répondre de manière stratégique, avec des arguments solides, une diplomatie agile et une vision à long terme.

Privilégier le canal du dialogue

J’invite instamment les États africains concernés à engager des consultations constructives avec les nouvelles autorités de la Maison Blanche. Une diplomatie apaisée, fondée sur la confiance, la clarté des positions et la recherche d’intérêts partagés, est toujours plus féconde que les postures d’affrontement.

Il ne s’agit pas de plaire, ni de céder, mais de défendre nos intérêts dans le respect des règles de la diplomatie internationale. N’oublions jamais que les grandes victoires se forgent souvent dans la discrétion des négociations et non dans la surenchère médiatique.

Renforcer nos capacités diplomatiques et intégrer la diplomatie scientifique

Il est urgent de former des diplomates mieux préparés aux réalités complexes de la géopolitique contemporaine. Il nous faut des représentations extérieures capables de décrypter les nouvelles dynamiques internationales, d’anticiper les changements systémiques et de défendre avec brio la voix de l’Afrique dans les espaces décisionnels mondiaux.

Plus encore, nous devons intégrer pleinement la diplomatie scientifique comme levier stratégique d’influence et de coopération. Dans un monde où la science, la technologie et l’innovation dictent les priorités des politiques internationales, l’Afrique ne peut rester en marge. Nos ambassades doivent devenir des plateformes de valorisation de notre potentiel scientifique, de mobilisation des talents de la diaspora, et de négociation de partenariats technologiques de haut niveau.

La diplomatie moderne ne se limite plus aux relations politiques ; elle s’étend aux enjeux climatiques, sanitaires, numériques, éducatifs et culturels. C’est dans cette approche holistique et résolument tournée vers l’avenir que réside la force de l’Afrique de demain.

Une Afrique unie, lucide et proactive

L’Afrique ne doit plus être en position de réaction, mais d’anticipation. Elle doit refuser l’émotion comme moteur de décision. Elle doit choisir la raison, la responsabilité et le dialogue comme instruments de sa montée en puissance sur l’échiquier mondial.

J’en appelle à nos Chefs d’État : faisons de la diplomatie une arme de paix, de respect et d’unité. Engageons-nous sur la voie d’un partenariat renouvelé avec les grandes puissances, y compris les États-Unis, dans l’intérêt de nos peuples, dans le respect de notre souveraineté, et pour la consolidation d’un monde plus juste et plus équilibré.

À propos de l’auteur

Ambassadeur Mamadou Bhoye BALDE est Représentant Pays du UNESCO Center for Peace des États-Unis en République de Guinée. Il est également Coordinateur du Sommet Scientifique des Nations-Unies en Guinée, auteur de plusieurs travaux sur la diplomatie scientifique et promoteur du projet de recherche intitulé « Réqualifier les missions diplomatiques guinéennes pour mieux répondre aux défis mondiaux d’ici 2030 ». Son engagement porte sur le renforcement de la diplomatie africaine à travers l’intégration de la science, de la jeunesse et de la coopération Triangulaire comme piliers de transformation durable.

 

 

 

 

 

Par l’Ambassadeur Mamadou Bhoye BALDE Représentant Pays du Centre UNESCO des Etats-Unis pour la Paix en République de Guinée

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