Guinée : Lettre ouverte aux héritiers du « système » (par Aboubacar Mandela Camara)

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Chers frères et sœurs, héritiers du système,

Je dois, avant tout, reconnaitre que vous avez eu la chance ou la malchance de naître dans la haute ou la moyenne bourgeoise ; l’ancienne ou la nouvelle. Vous avez eu la chance ou la malchance de naître dans du beurre et d’être bercés sur l’argent ; aujourd’hui, vous roulez sur l’or.

Contrairement à vos pairs de la basse classe, fils de cultivateurs, de petits fonctionnaires et de petits commerçants, vous, vous n’avez jamais connu la misère. Vous avez vécu comme les petits enfants des bourgeois occidentaux, vous avez connu toutes les couleurs et tous les goûts du luxe.

Vous avez fréquenté les meilleures écoles d’ici et d’ailleurs ; pas forcément à cause de votre mérite, mais à cause de votre origine sociale. On vous qualifie même d’ « enfants bien nés ». Vous êtes ou, vous avez été, ou encore vous serez, dans  les meilleures universités du monde ; profitant ainsi de bourses d’études acquises dans des conditions qui restent à élucider. Tant mieux   d’ailleurs !

Vos parents ont, pour cela, payé le prix pour que vous viviez comme de petits princes héritiers. Beaucoup d’entre eux ont dû « marcher à quatre pattes » afin que vous soyez ce que vous êtes aujourd’hui. Mais, ce n’est pas fortuit ! Un jour ou l’autre, il faudrait que vous montriez que vous êtes dignes de vos parents. Vous devez assurer la relève, leur relève. Aujourd’hui, ils sont vos protecteurs, demain, vous serez les leur. A travers vous, ils doivent se rassurer que leurs arrières sont bien couvertes contre d’éventuelles poursuites pour corruption et mauvaise gouvernance ; bref pour des crimes économiques et/ou politiques qu’ils auraient commis. Ils doivent aussi se rassurer que leurs biens mobiliers et immobiliers mal acquis et leurs comptes en banque dans les paradis fiscaux seront dans de bonnes mains et que leur dynastie règnerait pendant longtemps comme c’est le cas depuis l’indépendance de notre pays. Raison de plus pour eux de s’arc-bouter aux affaires jusqu’à ce que vous soyez capables de les substituer.

Chers frères et sœurs, héritiers du système,

Voyez-vous ? Ce n’est pas pour rien que vos parents prennent extrêmement soin de vous ; ils veillent sur vous comme de l’huile sur du feu. Ils sont très regardants sur vos fréquentations et vos choix. Ils craignent que vous n’exposiez le système et que vous ne le conduisiez à sa chute. Ils veillent donc aux grains !

Chers frères et sœurs, héritiers du système,

Laissez-moi vous dire aujourd’hui : nous serions très heureux de vous voir, un jour, aux affaires ; dans les hautes sphères de l’administration à tous les niveaux. Nous n’en avons même pas le choix !

Bien avant, j’ai quelques doléances à vous demander :

Primo : accepter de vous former afin d’être vraiment capables de nous sortir dans cette merde dans laquelle vos parents et arrières-parents nous ont foutu depuis toujours. Vous ne partez pas dans les pays de l’occident ou de l’orient pour une simple promenade de santé comme des touristes. Cherchez à très bien maitriser leur science, leurs techniques et leurs technologies et ramenez-les-nous.

Secondo : une fois aux affaires, prière de ne pas mimer vos parents et arrières-parents qui nous ont jeté dans ce puits. Je vous suggère de bien vouloir, le moment venu :

  • varier les couleurs du système
  • moderniser le système
  • ouvrir le système au mérite
  • démocratiser le système
  • libéraliser le système
  • bref, refonder le système.

Tertio : Soyez des hommes du peuple, proche, très proche du peuple ; des hommes de foi et de morale, non des ‘’princes machiavéliques’’ qui marchent sur des cadavres en guise de tapis rouge.

La reproduction sociale, oui. Mais, non à la reproduction d’un système qui broie ou maintient son peuple dans un enfer terrestre.

Aboubacar Mandela CAMARA

Citoyen Guinéen

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