La grève des enseignants déclenchée par le Syndicat Libre des Enseignants et Chercheurs de Guinée (SLECG) a fait couler beaucoup d’encres et de salives tant au niveau des enseignants qui soutenaient cette grève qu’au niveau des jeunes leaders issu du parti de l’opposition. Ce fut le cas du jeune Bah Mohamed Diouhé, membre du parti U.F.D.G, chargé à l’implantation et à l’organisation au sein du quartier HAFIA que nous avons contacté tout récemment au téléphone.
Au cours de cet entretien, ce jeune leader du principal parti de l’opposition témoigne les calvaires qu’il a traversé depuis l’arrivée d’Alpha Conde au pouvoir et dénonce les abus que les militaires ont exercés sur lui, vu son appartenance politique.
Lisez ce témoignage…
« Je me nomme Bah Mohamed Diouhé né le 5 juin 1988 à Guinée-Conakry. J’habite le quartier de HAFIA dans la commune de Dixinn avec ma famille. Je vends de l’alimentation générale dans une boutique dans le marché de la place pour subvenir à mes besoins et celle de ma famille.
Mon père est un grand commerçant en même temps il fait partie des membres fondateurs et influents du parti U.F.D.G. Je suis aussi membre du parti U.F.D.G chargé à l’implantation et à l’organisation du parti au sein de mon quartier car je suis convaincu du programme de société proposé par son président Elhadj Cellou Dalein Diallo. Nous sommes très connu dans le quartier de part notre militantisme et notre engagement au sein de l’U.F.D.G et cela ne plaisait pas aux autorités de la place, du coup nous étions toujours intimidés et harcelés.
J’étais toujours victime de harcèlement et de menaces au marchés et dans mon quartier, car j’ai toujours été reproché d’avoir mobilisé les jeunes pour les marches pacifiques et démocratiques organisées par l’opposition, c’est pour cela après la grève des enseignants du 20 Février 2017, j’ai été interpellé par les forces de l’ordre chez moi avec mon père aux environs de 04h du matin sans convocation préalable. Les soldats ont grimpé la cour en tirant des coups de feu, puis ils ont défoncé les portes de la maison principale pour entrer, ils étaient à la recherche de mon père et moi, comme quoi que nous sommes associés à la grève des enseignants pour saboter le pouvoir du président Alpha condé et ils précisent que nous sommes manipuler par le président de l’U.F.D.G Cellou Dalein Diallo ; que mais de toutes les façons nous les peulhs et notre leader, nous ne pouvons rien et nous allons tous finir nos jours en prison.
Du coup ils ont pris mon père au collet et il a été ligoté. Je me suis interposé puis je me suis battu avec certains soldats. J’ai réussi à les mettre par terre et lorsque j’ai voulu m’échapper d’eux, l’un d’entre eux a tiré sur moi, je suis tombé, la balle a transpercé mes côtes. Ils m’ont menotté et j’ai reçu des coups de crosse, des injures et des humiliations devant toute la famille qui était traumatisé et en pleurs. Ils nous ont embarqué dans un camion pour nous envoyer à la prison centrale de Conakry. Ils m’ont mis dans une cellule isolée, je saignais, j’avais trop mal et j’ai demandé à ce que je sois soigné mais personne ne voulait rien savoir. Je suis resté comme ça jusqu’au petit matin, et à un moment une infirmière est venue pour me mettre une bande et une piqure afin de stopper les saignements avant de passer l’interrogatoire pour m’obliger à dénoncer certains membres du parti et certains collègues du quartier. J’ai refusé catégoriquement de coopérer et là ils m’ont torturé en me tabassant à mort et éteignait les mégots de cigarettes sur mon corps, c’était horrible.
Depuis ce temps, nous sommes restés en prison sans jugement. Vu l’âge avancé de mon père, il a succombé en prison sous les coups et blessures qu’il avait subi et lors de son enterrement, ils m’ont refusé la liberté provisoire pour y assister, j’étais triste. Je suis resté en prison jusqu’au mois de juin puis j’ai réussi à m’évader par la corruption d’un haut gradé de la garde pénitentiaire du nom de commandant Kourouma, puis je suis parti à Koundara me reposer et me soigner avec la médecine traditionnelle car je ne pouvais pas rester à Conakry encore moins aller dans un hôpital public ou privé. Étant à Koundara pour mon traitement j’ai appris que des militaires seraient à ma recherche soit disant que je me suis évadé de la prison.
Pris de peur je me suis rendu par clandestinité au Maroc. À ma grande surprise, j’ai appris par le biais de mon neveu que dans la nuit du 13 au 14 novembre 2017 la maison familiale et ma boutique ont été pillées sous prétexte que je faisais parti de ceux qui ont mobilisé les élèves pendant la grève déclenché par le syndicat le 13 Novembre 2017 pour déstabiliser le pouvoir en place.
Dès lors j’ai décidé de trouver un passeur pour l’Espagne ensuite la France afin de sauver ma vie», a-t-il témoigné.
Bolokada Sano