Tentative d’assassinat de Donald Trump: un climat de violence politique toujours plus exacerbé

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L’ex-président et actuel candidat Donald Trump a été la cible d’une tentative d’assassinat lors d’un meeting en Pennsylvanie ce 13 juillet. Légèrement blessé à l’oreille, son service de sécurité est intervenu pour l’évacuer. Un spectateur a été tué et deux autres blessés. Le tireur a quant à lui été abattu par les services secrets. Aux États-Unis, des faits de violence et assassinats de personnalités politiques n’ont fait qu’empirer depuis l’élection de Trump en 2016.

« Battez-vous, battez-vous ! » Voilà les mots prononcés par Donald Trump, le poing levé, encerclé par son service de sécurité quelques instants après des tirs lors de son meeting à Butler en Pennsylvanie. Légèrement blessé à l’oreille droite et une trainée de sang sur le visage, le candidat républicain a été visé par une tentative d’assassinat, a confirmé le FBI, chargé de l’enquête. Cette attaque vient comme un révélateur des tensions politiques constantes qui traversent une société américaine à cran, et ne fait que renforcer son statut de favori en vue de la prochaine élection.

Très rapidement, le camp républicain a réagi en apportant son soutien à Donald Trump, n’hésitant pas à pointer du doigt son ennemi démocrate : « Depuis des années, et aujourd’hui encore, des militants de gauche, des donateurs démocrates, et même Joe Biden ont fait des remarques et des descriptions répugnantes sur le fait de tirer sur Donald Trump », a dénoncé Chris LaCivita, membre haut placé de l’équipe de campagne du candidat républicain, sur X. Quant à l’élu républicain Steve Scalise, victime en 2017 d’une fusillade qui a failli lui coûter la vie, il a lui accusé les démocrates d’alimenter une « rhétorique incendiaire ».

Pour ses soutiens politiques, bien que physiquement vulnérable, Trump s’est montré particulièrement bravache lorsqu’il s’est adressé à ses partisans avant d’être évacué. « Le président Trump était l’incarnation du courage sous le feu de l’ennemi, a déclaré Simone Ledeen, ancienne haute responsable du ministère de la Défense de Trump. Les photos emblématiques de lui diffusées à travers le monde montrent le véritable esprit américain. »

 

 

 

Pour les complotistes américains, la récupération est immédiate : il s’agit d’un acte organisé par les démocrates, à l’instar du sénateur Vance, pressenti pour devenir le colistier de Donald Trump : « Il ne s’agit pas aujourd’hui d’un simple événement isolé. Le postulat central de la campagne de Biden est de dire que le président Trump est un fasciste autoritaire qu’il faut arrêter à tout prix. Cette rhétorique a directement conduit à la tentative d’assassinat du président Trump », a-t-il déclaré sur son compte X.

Depuis le début, la campagne présidentielle est violente, les échanges entre les deux candidats qui se détestent, très virulents, à tel point que l’opinion publique est profondément mécontente des options qui s’offrent à elle. Reste à savoir quel impact aura la fusillade contre le candidat Trump dans les prochains mois. « Dans les deux camps, on a le sentiment que le climat est très tendu. La personnalité et le discours agressif du président Trump ont renforcé cette dynamique. Dans un pays où il y a beaucoup d’armes et de tensions politiques, les journalistes et médias ont toujours eu peur de ce genre d’incident », explique le journaliste américain Will McGrew au micro de Jelena Tomic, du service international.

Le candidat républicain Donald Trump après une tentative d’assassinat à Butler, aux États-Unis, le 13 juillet 2024.

Violence armée

Aux États-Unis, on recense 393 millions d’armes à feu en circulation, pour 341 millions d’habitants, soit environ 120,5 armes à feu pour 100 habitants, selon des chiffres publiés par le Small Arms Survey, projet indépendant sur la recension d’armes à feu de l’Université de Genève en 2018. Les Américains possèdent, à eux seuls, près de la moitié des armes à feu détenues par des civils dans le monde.

« La tentative d’assassinat de Trump correspond bien à la disponibilité des armes de type AR-15, utilisés dans la plupart des tueries, et impliquée hier. On constate aussi la montée de la violence verbale qui passe à la violence physique et armée », expliquait Lauric Henneton, maître de conférence à l’université Versailles-Saint-Quentin, spécialiste de la politique américaine, sur RFI ce dimanche.

Environ quatre Américains sur dix déclarent vivre dans un foyer où il y a une arme à feu, dont 32 % déclarent en posséder une personnellement, selon un rapport publié par le centre de recherche Pew Research Center en août 2023. Les républicains sont plus de deux fois plus susceptibles que les démocrates de déclarer qu’ils possèdent personnellement une arme à feu (45 % contre 20 %). Et 79 % des républicains sondés estiment que la possession d’une arme à feu contribue davantage à accroître la sécurité, tandis qu’une proportion presque identique de démocrates (78 %) estime qu’elle contribue davantage à réduire la sécurité.

Dans un pays qui est malade de ces armes à feu, voir quelqu’un se balader avec un fusil semi-automatique, ça ne choque pas tant que ça. Ça va sans doute faire partie du narratif de chacun des deux partis. Du côté démocrate, c‘est certain parce que la limitation et la régulation du libre port d’armes figure en bonne place sur le programme. En revanche du côté républicain, on avait une réticence très forte à parler politique quand il s’agissait de l’usage des armes à feu. Là, ça pourrait changer.

Montée de la violence depuis 2016

Depuis des années, le camp démocrate accuse Donald Trump d’avoir été l’instigateur d’un climat politique parfois irrespirable. Le président Joe Biden a plusieurs fois alerté contre le risque de « chaos ». L’ancien président républicain a toujours fait de ses sorties incendiaires, volontiers provocatrices, une marque de fabrique.

« Donald Trump est dans une guerre des récits contre un Joe Biden présenté comme faible et capitalise sur des valeurs plus virilistes, analyse Lauric Henneton. Il renforce sa puissance et sa capacité à mener le pays. Le côté survivant, où même un sniper n’arrive pas à l’arrêter, va accentuer le fossé entre les deux candidats. »

En août 2017, Donald Trump avait été vivement critiqué après un rassemblement d’extrême droite à Charlottesville en Virginie, lors duquel un sympathisant néonazi avait foncé en voiture dans une foule de contre-manifestants, tuant une jeune femme de 32 ans et blessant une vingtaine d’autres personnes. Il avait condamné ces violences mais sans se prononcer sur la responsabilité de l’un ou l’autre camp.

En 2020, Gretchen Whitmer, gouverneure démocrate du Michigan, souvent prise pour cible par Donald Trump, avait été visée par un projet de kidnapping monté par des miliciens d’extrême droite. Selon la police fédérale, ils représentent la principale menace terroriste sous le mandat de l’ex-président.

 

L’un des événements les plus marquants est l’attaque du Capitole à Washington le 6 janvier 2021. Une session conjointe de la Chambre des représentants et du Sénat, qui demandaient un recompte des voix des résultats de la présidentielle de 2020, était en cours lorsque des milliers de manifestants pro-Trump ont forcé l’entrée du bâtiment, causant la mort de cinq personnes et en blessant beaucoup d’autres.

Suite à cet assaut, de nombreux instituts de sondage ont constaté une hausse de la violence. Et selon la police du Capitole, chargée de protéger les élus du Congrès, les menaces contre ces derniers ont plus que doublé depuis l’investiture du milliardaire républicain.

Et plus récemment en octobre 2022, le mari de l’élue démocrate Nancy Pelosi avait été attaqué par un homme muni d’un marteau et qui cherchait en réalité la dirigeante américaine.

Selon une étude menée chaque année en mars par l’institut Gallup, concernant un certain nombre de préoccupations des Américains, 53 % des interrogés se disent très inquiets de la criminalité et de la violence. Par ailleurs, les républicains sont bien plus préoccupés (66 %), que les démocrates (39 %), selon ce même sondage.

Même si le pire a été évité lors du meeting de Trump, ce 13 juillet, on a eu l’impression que c’était l’aboutissement terrible de la menace qui s’est développée depuis les fusillades qui auraient pu coûter la vie à la démocrate Gabrielle Giffords en 2013, Steve Scalise en 2017 et l’attaque du Capitole, le 6 janvier 2021. « La vraie question est de savoir quelles sont les implications pour notre pays : allons-nous reculer ou nous enfoncer davantage dans la division et la violence ? », interrogeait David Axelrod, stratège démocrate.

« Ce qui me préoccupe, c’est de savoir si s’il s’agit d’un épisode unique ou si nous entrons dans une période comme celle qui s’est déroulée de 1963 à 1981 [l’assassinat du président Kennedy en 1963, celui du pasteur Martin Luther King en 1968 ou encore la tentative contre le président Reagan en 1981, NDLR] », s’inquiète l’ancien haut conseiller du président George W. Bush, Karl Rove.

Avec AFP

 

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